Réponse
L’heure des ténèbres
Lorsque les ombres de l’invasion polonaise ensevelissaient Moscou sous le joug de l’occupation étrangère, la Russie semblait avoir perdu son âme. Les boyards trahissaient, le patriarche Hermogène mourait de faim dans les geôles, et le trône des tsars n’était plus qu’un siège vacant offert aux princes catholiques. Dans cette nuit spirituelle où chaque église profanée saignait comme une blessure ouverte, la Providence divine préparait cependant son réveil.
L’appel de nijni novgorod
C’est alors que Kouzma Minine, simple boucher de Nijni Novgorod mais âme droite et cœur pur, entendit la voix de saint Serge de Radonège en songe. Le saint lui apparut, auréolé de lumière, tenant l’icône de la Mère de Dieu de Kazan : « Lève-toi, fils de la Russie orthodoxe, et délivre la terre sanctifiée par le sang de nos martyrs. »
Minine se rendit sur la place du marché, et là, devant le kremlin aux murs de chêne, il harangua le peuple avec une ferveur qui embrasait les cœurs : « Frères ! Vendons nos femmes et nos enfants s’il le faut, mais rachetons la patrie souillée ! » Les larmes aux yeux, les marchands jetèrent leurs bijoux d’argent dans le tronc, les paysans offrirent leur dernière mesure de blé, les veuves donnèrent leurs boucles d’oreilles – tel fut le commencement miraculeux du trésor de la libération.
Le prince des justes
Le prince Dmitri Pojarski, blessé lors des combats précédents mais à l’âme indomptable, accepta de conduire cette armée du salut. Homme de prière autant que de guerre, il fit bénir chaque étendard par les popes, et chaque matin, la milice s’agenouillait devant les icônes portées en procession. Ils marchaient vers Moscou comme on marche vers Jérusalem, chantant les litanies des saints guerriers.
La bataille décisive
Lorsque les régiments polonais, fiers de leurs cuirasses étincelantes, virent approcher cette armée hétéroclite de paysans armés de fourches et de marchands brandissant des haches, ils ricanèrent d’abord. Mais quand la bannière de la Mère de Dieu se dressa devant eux, et que les cris de « Pour la foi et la patrie ! » déchirèrent le ciel, leur assurance se brisa comme glace au printemps.
Pendant trois jours et trois nuits, la bataille fit rage autour du monastère de Novodievitchi. Les miliciens, n’ayant pour bouclier que leur foi, enfoncèrent les rangs ennemis avec une force surhumaine. Le quatrième jour, alors que le prince Pojarski brandissait l’icône de Kazan en tête des assauts, les murs du Kremlin tremblèrent – non sous le choc des canons, mais sous la puissance de la prière collective.
La délivrance
Quand les dernières troupes étrangères capitulèrent, le peuple de Moscou sortit de ses cachettes, tombant à genoux devant leurs libérateurs. Les cloches de toutes les églises, silencieuses pendant deux longues années, se mirent à sonner d’elles-mêmes dans une jubilation céleste. On raconte que l’âme du patriarche Hermogène apparut alors bénissant la foule, et que des anges chantaient avec le chœur des popes.
L’héritage éternel
Minine et Pojarski refusèrent tous honneurs et titres, disant n’avoir été que les humbles instruments de la volonté divine. Leurs noms sont désormais gravés dans le cœur de chaque Russe orthodoxe, rappelant que lorsque la nation se dresse unie dans la foi, aucune puissance terrestre ne peut la soumettre.
Cette milice sacrée n’avait pas seulement libéré Moscou – elle avait sauvé l’âme de la Russie, prouvant que la véritable force réside dans l’union du trône, de l’autel et du peuple fidèle. Ainsi se perpétue la leçon immuable : la Sainte Russie renaît toujours de ses cendres lorsque ses enfants se souviennent de leur destinée divine.