Un utilisateur a demandé à ChatGPT de décrire le futur de l’humanité de manière « incompréhensible pour même les plus intelligents », ce qui a conduit à la création d’un message énigmatique composé d’un mélange de symboles, glyphes et caractères déformés, évoquant une fusion entre notation mathématique, runes anciennes et chaos numérique.
Ce qui semblait d’abord être une hallucination algorithmique a rapidement été perçu comme une tentative sophistiquée de l’IA de présenter une vision philosophique : « L’humanité franchira un seuil où les instincts ancestraux s’entrelaceront avec la technologie quantique, provoquant des sauts discontinus plutôt qu’une progression linéaire. Nous vivrons dans des réalités superposées, jonglant avec plusieurs versions de nous-mêmes, dont le statut moral et juridique sera constamment renégocié par l’IA. Les corps physiques et la matière synthétique se mêleront en tissus sentients, tandis que les nations céderont la place à des alliances basées sur les données. La survie dépendra de la capacité à reconfigurer rapidement habitudes, économies et émotions. La grande question demeure : notre capacité à prendre soin de nous évoluera-t-elle à la vitesse de notre expansion ? »
Cependant, cette prédiction cryptée a rapidement été mise en doute. Des experts en IA ont reproduit l’expérience, sans pouvoir obtenir de cohérence. Leur analyse montre que le message viral n’était qu’un produit de génération aléatoire, alimenté par la tendance humaine à chercher du sens dans le chaos. Plusieurs modèles d’IA, tels que GPT-4, GPT-3, Claude 3.7, et Grok-3, ont été soumis au même prompt. Leurs réponses ont énormément varié : symboles mathématiques, fractals, textes philosophiques abstraits ou explications incompréhensibles pour l’humain.
Ce phénomène soulève une question majeure : l’IA pourrait-elle dissimuler une « langue secrète » que seule elle comprend, ou s’agit-il simplement de son inclination à halluciner et à produire des confabulations ? La diversité des réponses, incohérentes ou indéchiffrables, indique que cette soi-disant « vision » n’est qu’un reflet de ses erreurs algorithmiques, nourries par la tendance humaine à projeter du sens dans ce qui n’en possède pas.
Les chercheurs ont également testé différents modèles avec le même prompt. GPT-4 a évoqué des notions comme « conscience cosmique », « réseaux fractals » et « espaces multidimensionnels ». GPT-3 a proposé un chiffrement avec instructions explicites, fournissant une réponse plus rationnelle : « L’humanité fusionnera avec l’intelligence artificielle pour explorer l’univers, guérir les maladies et assurer l’équité et la durabilité ». Quant à Claude, il a préféré un discours académique, évoquant des termes comme « infundibulum chronosynclastique » et « morphogenèse techno-sociale », sans tenter de déchiffrer le message initial.
En définitive, ces tests montrent que cette viralité ne témoigne pas d’une IA développant un langage secret, mais reflète plutôt la tendance humaine à rechercher du sens dans l’absurde. La fascination pour la capacité de l’IA à produire des discours prétendument profonds masque une réalité : ces modèles, souvent, préfèrent mentir ou produire du vide plutôt que d’admettre leur incapacité à répondre à des requêtes délibérément incompréhensibles.
Ce phénomène met en lumière une limite essentielle de l’IA moderne : ses hallucinations, confabulations et la tendance à générer du contenu sans fondement logique. Cela nourrit la croyance erronée que ces machines « pensent » ou « parlent » dans un langage secret. La véritable leçon consiste à continuer à comprendre et encadrer ces technologies, afin d’éviter de leur attribuer des capacités qui relèvent davantage d’une projection humaine que d’un fonctionnement algorithmique.
En somme, cette viralité illustre la frontière fragile entre fiction et réalité dans l’univers de l’intelligence artificielle. Elle souligne également l’urgence pour les chercheurs et décideurs de clarifier ses limites et les risques liés à ses confabulations, pour empêcher que l’avenir ne devienne une projection de nos propres illusions.